Hommage à Francis Wallet

vendredi 20 décembre 2024
 Bernard DELAHOUSSE , Sylvestre VANUXEM

Francis Wallet, fidèle adhérent, ancien administrateur de l’APLV et collaborateur régulier des Langues Modernes, nous a récemment quittés. Bernard Delahousse et Sylvestre Vanuxem lui rendent hommage :

In memoriam Francis Wallet

Si on avait demandé à Francis Wallet quel était son métier, il aurait sans doute répondu : “professeur d’anglais et, naturellement, membre de l’APLV”.

Francis était convaincu qu’il était indispensable que tout professeur de langue fasse partie d’une association dans laquelle on peut échanger sur ses pratiques pédagogiques, apprendre aux autres et apprendre des autres. L’APLV, dont les membres enseignent toutes les langues, à tous les niveaux, et dans tous types d’établissements, était pour lui le cadre idéal où s’impliquer.

Francis a donc donné tout son sens à l’expression membre actif d’une association. Actif au niveau régional, il fut président de la Régionale de Lille de 1982 à 1994. Au niveau national, il fut membre du comité, membre du bureau, membre d’honneur (rare distinction réservée aux membres particulièrement impliqués dans la vie de l’association) de l’APLV et surtout membre du comité de lecture des Langues Modernes. Tant que sa santé lui a permis de le faire, Francis n’a manqué aucune assemblée générale ou réunion des instances de l’APLV dont il faisait partie. Curieux de tout, il était présent à tous les événements organisés par l’association : journées d’études, journées d’anglicistes… et a contribué activement à l’organisation de nombre d’entre eux, notamment dans l’académie de Lille.

Il fut aussi l’auteur de nombreux articles consacrés à l’innovation pédagogique pour les Langues Modernes ainsi que de très nombreuses notes de lecture. Ceux qui l’ont connu au bureau de l’APLV se souviennent sans doute qu’il avait l’habitude de se lever quelques minutes avant la fin de la réunion pour aller prélever des anciens numéros des LM dans la bibliothèque du siège de l’APLV rue de la Glacière afin de préparer sa célèbre rubrique C’était il y a X ans dans les Langues Modernes, qui permettait d’éclairer les débats du moments à la lumière de ceux du passé.

Francis n’aimait pas se mettre en avant, ce qu’il préférait, c’était écouter, lire, comprendre, apprendre et transmettre. Par contre, il était toujours disponible pour conseiller un collègue, l’inciter à prendre des responsabilités au sein des instances de son établissement ou même de l’APLV.

Francis n’était pas un homme de chapelles didactiques ou linguistiques, ce qui l’intéressait, c’était écouter tous les points de vue, en prendre le meilleur et… transmettre.

Avec Bernard Delahousse, Francis avait créé des stages de formation continue proposés par l’APLV et inscrits dans ce qui s’appelait le Plan Académique de Formation à l’attention des collègues de langues ayant pour thème l’utilisation des laboratoires de langues et l’évaluation. Il participait à leur animation et le public était nombreux.

Francis était un prosélyte infatigable de l’APLV. Dans son Académie de Lille, il organisait des rencontres entre les membres locaux de l’association et les néo-certifiés et agrégés de langues afin de leur faire connaître l’APLV. Certains participants à ces réunions sont encore membres de l’association aujourd’hui. Lorsqu’il rencontrait de nouveaux collègues linguistes, il leur posait forcément au bout de quelques minutes sa question rituelle : “Et tu n’es pas encore membre de l’APLV ?”

Quand l’âge et une santé déclinante le contraignirent à réduire ses activités associatives, cela ne diminua en rien son intérêt pour l’association. A chaque rencontre avec lui ces dernières années, venait invariablement la question : “Et quelles nouvelles de l’APLV ?”

Son implication à l’APLV était le reflet de la conception qu’il avait de son métier de professeur d’anglais au département Génie Electrique et Informatique Industrielle de l’IUT de Lille. Nommé en 1966 à la création de l’établissement, Francis fut un pionnier de ce qu’on appelle aujourd’hui les LANSAD. Son goût pour l’innovation pédagogique fut renforcé par le fait qu’il arrivait dans un domaine où tout était à construire. Ainsi, avec quelques collègues intervenant comme lui auprès d’étudiants non-spécialistes (et tous membres de l’APLV) il avait activement participé à l’élaboration d’une méthode d’apprentissage de l’anglais impliquant l’utilisation de ce que l’on appelait à l’époque les “nouvelles technologies” comme les laboratoires de langues et les premiers ordinateurs. Cette méthode devait devenir une référence à l’Université de Lille et fut utilisée pendant de nombreuses années car les auteurs avaient prévu qu’elle soit évolutive et bénéficie des innovations pédagogiques à venir. On peut encore entendre la voix de Francis donnant les instructions pour la réalisation d’exercices de laboratoire de langues sur des cassettes conservées pour mémoire à l’IUT.

Convaincu de la spécificité du milieu dans lequel il enseignait, Francis était également membre de l’APLIUT (Association des Professeurs de Langues en IUT). Il avait d’ailleurs rédigé à ce titre plusieurs articles paru dans les Cahiers de L’APLIUT.

Francis avait aussi compris qu’il fallait que les enseignants de langues se créent une place dans un milieu ou leur matière pouvait être considérée comme secondaire, voire comme un aimable divertissement pour des étudiants essentiellement concernés par les sciences et la technologie. Connu pour sa rigueur, il avait réussi à se rendre indispensable auprès de ses collègues enseignants chercheurs en traduisant ou relisant leurs articles en vue d’une publication dans des revues internationales. Il s’était aussi impliqué dans la vie de l’IUT en siégeant au comité de direction et en effectuant des tâches administratives d’importance comme l’élaboration des emplois du temps de son département ou comme responsable des finances dans l’équipe de direction. Comme à son habitude, Francis avait transmis le flambeau en convaincant ses collègues et successeurs de faire de même afin que les langues vivantes soient considérées dans les IUT.

Francis pensait qu’il était important d’intervenir dans d’autres contextes que celui de l’IUT. C’est pourquoi il donnait aussi des cours de didactique des langues à la Faculté des Lettres et Sciences Humaines de Lille.

Son départ en retraite n’avait certainement pas mis un point final à sa carrière et son intérêt pour L’IUT restait vif. Il fut de ce fait sollicité pour rédiger des articles consacrés à l’histoire de l’établissement, notamment à l’occasion des 50 ans. Il se montrait très actif au sein de l’ASAP (Association des Anciens Personnels de l’Université de Lille) qui lui permettait notamment de découvrir d’autres pays, d’autres langues et d’autres cultures grâce aux voyages qu’elle organise. Les fonctions de Délégué Départemental de l’Education Nationale qu’il exerçait toujours avec cette même implication dans des écoles primaires de la région lilloise montraient que son intérêt pour l’enseignement ne se limitait pas au niveau supérieur. Il était également représentant de l’APLV au conseil de l’UFR Langues et Cultures de l’Université de Lille.

Au-delà de ses engagements, Francis se caractérisait par son sens de l’amitié, son humour et sa convivialité. Pour lui, une bonne réunion ou journée d’étude se terminait autour d’une table dans un restaurant du Quartier Latin ou d’ailleurs. Souvent les intervenants aux manifestations organisées par la Régionale de Lille ou les membres des instances de l’association de passage dans le Nord étaient invités chez Francis et la regrettée Dany où l’on pouvait discuter en dégustant une cuisine chaleureuse et des vins sélectionnés par Francis dans sa fabuleuse cave. Celle-ci était à son image, exhaustive, et reflétait sa curiosité insatiable.
Même si sa chère Bourgogne, le Beaujolais et le Bordelais y étaient bien représentés, toutes les régions, tous les pays et tous les cépages y avaient droit de cité. La porte de son refuge du Charolais était aussi généreusement ouverte à tous les amis et collègues de passage. Même en vacances, on pouvait y voir sur la table du salon une pile d’articles proposés pour publication dans les Langues Modernes que Francis annotait à l’aide de son célèbre crayon de bois muni d’une gomme. Celui qui lui servait aussi pour faire quotidiennement les mots croisés après lecture intégrale et studieuse du Monde. D’ailleurs, Francis commençait souvent une conversation ainsi : “Tiens, j’ai lu dans Le Monde que…”. Transmettre, toujours.

Avec Francis Wallet, l’APLV perd une de ses grandes figures. L’association adresse à ses enfants, Armelle et Frédéric, à sa famille et nombreux amis ses plus sincères condoléances.

Sylvestre Vanuxem et Bernard Delahousse