L’hébreu en péril - sans la réouverture de concours de recrutement, l’hébreu risque de disparaître

dimanche 7 septembre 2014

L’APLV publie un point sur l’enseignement de l’hébreu en France et s’inquiète de la disparition de cette langue aux concours de recrutement d’enseignants.


Depuis l’année scolaire 2010-2011, les concours d’agrégation et de CAPES d’hébreu sont suspendus. Aucun concours n’étant prévu pour 2014-2015, cela portera à cinq années consécutives le nombre d’années sans ouverture de concours de recrutement. De 1973 à 2009, chaque année, un poste au moins a été proposé au concours, parfois plus (jusqu’à 5 ou 6 dans les années 1980). La situation actuelle est donc sans précédent.

Un enseignement bien implanté

L’hébreu est enseigné dans les établissements secondaires publics depuis les années soixante, au lendemain de la signature, en 1959, d’accords culturels franco-israéliens. Une charge de mission d’inspection générale d’hébreu est créée en 1972, le CAPES en 1973 (à cette même date sont rédigés les premiers programmes officiels) et enfin, l’agrégation, en 1977.
Au cours de l’année scolaire 2013-2014, un peu moins de 6 000 élèves suivaient un enseignement d’hébreu dans les établissements publics et privés sous contrat. Les chiffres communiqués par la base de données statistiques du système éducatif français font état de 7 000 élèves environ, en incluant les établissements hors-contrat.
On dénombre une vingtaine d’établissements publics et une quarantaine d’établissements privés où l’hébreu est enseigné en France. Les élèves inscrits dans l’enseignement public représentent environ 15% des effectifs globaux. Dans les établissements publics, une vingtaine de professeurs sont actuellement en poste. Il s’agit de professeurs titulaires du CAPES ou de l’agrégation.
Dans les établissements privés, on compte environ 70 professeurs (dont quelques-uns enseignent à temps partiel). Seul un tiers d’entre eux est lauréat d’un concours de recrutement.

L’hébreu en péril

La pyramide des âges des enseignants démontre la gravité de la situation étant donné que sur la vingtaine d’enseignants du public, plus de la moitié partira à la retraite dans les trois ou quatre prochaines années. En l’absence de renouvellement du corps enseignant, il est impossible d’envisager l’ouverture d’un enseignement de l’hébreu dans les établissements où il y en aurait la demande. Le maintien de la discipline est indissociable d’une démarche prospective, ce qui est impossible étant donné le manque de ressources humaines.
En septembre 2010, un master d’enseignement préparant aux concours de recrutement de professeurs d’hébreu a été créé dans le cadre d’un partenariat INALCO-IUFM. Mais les étudiants inscrits n’ont pu passer le concours auquel ils s’étaient préparés faute d’ouverture du CAPES en 2012.
L’absence de CAPES et d’agrégation a, en outre, une incidence fâcheuse sur la qualité de l’enseignement dispensé aux élèves, dans la mesure où les contractuels bénéficient, certes, d’une formation continue, mais qui n’est pas comparable à la formation initiale que suivent les lauréats des concours.

L’hébreu fait partie du patrimoine universel

Le maintien de l’enseignement de l’hébreu dans les établissements publics est un bien précieux. Il serait éminemment souhaitable que les parents désireux que leurs enfants apprennent l’hébreu ne soient pas contraints de les inscrire dans un établissement privé. Enfin, l’importance de l’hébreu ne peut être réduite à la réalité statistique, à des effectifs certes modestes. Langue à la fois classique et moderne, langue de culture et langue vivante, l’hébreu doit rester accessible aux élèves qui désirent s’y initier dans les collèges et les lycées de France, car il fait partie à la fois de la diversité et du patrimoine français et humain. Cet objectif ne peut être atteint sans une réouverture des concours dès l’année prochaine. L’avenir de l’enseignement de l’hébreu en France en dépend.

Yaël Dagan
Professeur certifiée d’hébreu
Membre de l’APLV