Réaction de l’APLV à la diminution du nombre des postes aux concours de recrutement de l’Education Nationale

mardi 4 décembre 2018

Le ministère de l’Education Nationale vient de publier au Journal Officiel les tableaux de répartition par disciplines des postes ouverts aux concours de recrutement pour 2019. La baisse du nombre de postes se poursuit et se renforce, et les langues vivantes étrangères et régionales sont l’une des disciplines les plus touchées.

A l’agrégation, si le nombre de postes global reste le même, le rééquilibrage entre disciplines se fait au détriment des langues. Le breton et le corse disparaissent des concours (mais le basque, le catalan et l’hébreu reviennent). A l’agrégation externe, l’allemand perd 15 postes (soit une diminution de 23%), l’anglais 14 (- 8%), l’espagnol 8 (-14%), l’italien 3 (-38%). L’italien est particulièrement pénalisé, puisque cette langue perd la même proportion de postes (- 38%) au concours interne.

Au CAPES, l’allemand perd 25 postes à l’externe (- 9%), l’anglais 117 (- 12%), le chinois 2 (- 17%), l’espagnol 93 (- 22%), l’italien 3 (- 16%). Si l’on comptabilise ensemble les trois concours du CAPES, le déficit reste lourd : 6% de postes en moins en allemand, 9% en anglais, 12% en chinois, 16% en italien, 17% en espagnol.

Aux CAPLP, l’érosion est encore plus forte, avec une suppression de la moitié des postes en lettres-anglais (65 au lieu de 130) et en lettres-espagnol (25 au lieu de 50).

Ces chiffres sont désastreux pour l’enseignement des langues. Il n’est pas possible de ne pas faire un lien entre les réformes menées cette année par le ministère (réforme du lycée général et technologique, réforme du lycée professionnel) et l’annonce de ces suppressions massives de postes en LVER. Dans plusieurs des rencontres de l’APLV avec des cadres du ministère, des conseillers du Ministre ou l’Inspection Générale, il nous a été dit clairement que l’objectif de diminution des coûts n’était pas ce qui présidait aux réformes en cours. Nous ne pouvons que constater aujourd’hui que nos interlocuteurs ne nous ont pas dit la vérité et que le choix du ministère est délibérément économique.

Supprimer des postes de professeurs de langue, c’est aller contre les efforts faits depuis des décennies par les professeurs en poste, qui tiennent tant bien que mal devant des classes à effectifs nombreux avec des horaires insuffisants. Qu’en sera-t-il demain avec moins de professeurs et un nombre d’élèves global qui s’accroît ? Les rectorats ne pourront qu’augmenter encore le nombre d’élèves par groupe de LVER. Au-delà, comme ce sont les quatre langues qui peuvent faire l’objet d’un enseignement de spécialité en lycée général (allemand, anglais, espagnol, italien) qui perdent le plus grand nombre de postes, il faut prévoir que le choix de la spécialité « Langues, littératures et cultures étrangères » sera, au fil des années, de moins en moins proposé aux jeunes Français.

Le président de la République avait affirmé en septembre 2017 : « L’Europe doit être cet espace où chaque étudiant devra parler au moins deux langues européennes d’ici 2024. […] Vos générations ont à conjuguer cette Europe en plusieurs langues ! L’Europe du multilinguisme est une chance inédite ». Un an après et alors que, comme l’a encore montré récemment le rapport Manes-Taylor, les résultats en langues des jeunes Français dans les enquêtes internationales ne sont pas glorieux, le ministère s’attaque à l’enseignement des LVER. Seuls les lycéens qui suivent des cursus spéciaux, comme les sections internationales ou les SELO, ou ceux qui disposent des moyens d’aller suivre des cours ou des séjours linguistiques pendant les vacances dans des pays étrangers seront à même d’atteindre le niveau de compétence que le président de la République annonçait pour « chaque » étudiant. Le ministère de l’Education Nationale fait résolument le choix de rendre le système éducatif plus inégalitaire. Dans le contexte actuel, ce choix particulièrement malheureux est très grave.