Réaction de l’APLV à l’annonce de la suppression des ELCO

samedi 22 février 2020

L’APLV se réjouit de l’annonce faite le 18 février à Mulhouse par le président de la République de la suppression des ELCO à la fin de cette année scolaire. Dans un courrier du 15 juillet 2018, notre association avait demandé au ministre de l’Education Nationale de prendre cette mesure (https://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article7117) pour les raisons mêmes que le président de la République évoque aujourd’hui : le faible niveau de français de certains professeurs d’ELCO, leur absence de formation pédagogique et l’existence de pratiques de propagande nationaliste et/ou religieuse.

Les ELCO avaient leur raison d’être lorsqu’ils ont été créés il y a cinquante ans, à une époque où on pensait que l’immigration était un phénomène temporaire : le dispositif avait l’objectif louable de préserver les langues familiales et de permettre la réadaptation des enfants dans le pays de leur famille, en cas de retour. Il s’agissait d’un enseignement facultatif, en dehors du temps scolaire, qui ne stigmatisait pas ses élèves et n’était pas une adaptation des programmes à des publics scolaires considérés comme fragiles. Mais avec le temps et les changements politiques advenus dans certains pays partenaires, le maintien du dispositif paraît aujourd’hui problématique.

Dans son discours de Mulhouse, le président de la République a repris le projet de 2016 de Najat Vallaud-Belkacem de transformation des ELCO en EILE, mais il n’a rien dit sur une des innovations les plus intéressantes des EILE, l’ouverture de l’enseignement à tous les élèves volontaires de l’école. Grâce à cette mesure, la présence d’une communauté étrangère dans une ville ou un quartier, motivant l’ouverture d’un EILE, peut permettre à tous les enfants, y compris ceux qui ne sont pas issus de familles immigrées, de s’initier à une langue étrangère et de recevoir un enseignement de ses rudiments.

Au-delà de l’indispensable exigence d’acceptation par les intervenants étrangers des principes de la République, au premier rang desquels le respect de la laïcité et de la neutralité, la question des qualifications pédagogiques reste entière. L’APLV ne peut accepter que des mesures de contractualisation de certains des professeurs d’ELCO soient prises pour les maintenir dans leurs enseignements, et cela alors même que le ministère de l’Education Nationale se refuse à organiser des concours de recrutement en turc (où le dernier concours remonte à 2000), et n’augmente pas le nombre de postes aux CAPES et agrégations d’arabe. Pour mémoire, le ministre avait annoncé le 10 septembre 2018 le développement de l’enseignement de l’arabe, du chinois et du russe, et cette promesse est à ce jour restée vaine, comme l’APLV le rappelait dans un texte de décembre 2018 sur la baisse du nombre de postes aux concours (https://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article7310), baisse qui n’a fait depuis que s’accentuer (https://www.aplv-languesmodernes.org/spip.php?article7893).

Enseigner est un métier et, comme pour tout métier, enseigner s’apprend. Etre locuteur natif d’une langue n’est pas une condition suffisante pour pouvoir l’enseigner avec efficacité et en accord avec les préconisations pédagogiques et les principes de la République. Pour sortir de dispositifs bricolés ou de situations scabreuses, la seule solution est le recrutement, dans les langues vivantes peu enseignées, de professeurs certifiés et agrégés en nombre suffisant pour développer l’enseignement efficace et laïc des langues et des cultures qu’elles véhiculent.