La revue s’intitulait Revue et Bulletin de l’APLV, elle était légèrement plus haute (2,5 cm) et plus large (0,5 cm). Sa couverture était blanche avec un liseré rose ; le bandeau inférieur indiquait l’année, le numéro, la date avec le sigle APLV au milieu.
Je suis le deuxième rédacteur en chef depuis 1945. Mon prédécesseur, Henri Kerst, un de mes collègues au Lycée Henri IV à Paris, a exercé cette charge jusqu’en 1952. Il avait remis la revue sur pied aussitôt après la guerre et lui a donné la forme qu’elle a conservée, avec des changements mineurs, jusqu’en 1973 (format actuel), puis 1983 (couverture en couleur), enfin 1996 (nouvelle maquette). Nous nous rencontrions fréquemment en salle des professeurs, et j’étais devenu en 1952 membre du Comité ; j’ai participé avec son aide à l’élaboration du numéro 3 de mai-juin 1953, c’est seulement à partir du numéro 4 que j’ai figuré, en page 4 de la couverture, avec le titre de Rédacteur en Chef. En 1953, le cinquantenaire de l’Association avait été célébré par un numéro spécial, doté d’une bordure très 1900, qui avait eu un très grand succès.
La revue, qui paraissait 6 fois par an, était imprimée à Cahors, où je suis passé pour une visite amicale pendant l’été 1956. La composition de chaque numéro, qui comprenait 80 pages en moyenne, ne posait pas de problèmes matériels insurmontables, dans la mesure où les caractères avaient été choisis une fois pour toutes. S’ajoutaient une douzaine de pages de publicité, notamment pour les ouvrages de la maison Didier, avec laquelle l’Association entretenait des liens étroits.
Chaque numéro incluait obligatoirement trois rubriques : la Vie de l’Association (réunions du Bureau, du Comité, des Régionales), les Informations Officielles, et la Bibliographie. Trois types d’articles paraissaient, qui concernaient, il va de soi, la pédagogie, les littératures et les civilisations étrangères, avec un nombre de pages par rubrique très variable selon les numéros. Il ne faut pas oublier les articles nécrologiques, qui nous ont permis de rendre hommage à des linguistes ou auteurs de manuels disparus dans les années 50 : Bedarida, Bodevin, Garnier, Lemonnier, Fernand Mossé ...
Le numéro 3 de 1953, le premier auquel je collabore, s’ouvrait sur un article, très littéraire, d’un Inspecteur Général fraîchement nommé, R. Brugère, consacré à un roman inédit de Swinburne, Lesbia Brandon. Ce type d’article reflétait plus les préoccupations des collègues de l’Enseignement Supérieur que celles des adhérents, en très grande majorité des professeurs du Second Degré.
Dans la partie Vie de l’Association, on lit des comptes-rendus détaillés de trois réunions du Comité (rédigés par moi Secrétaire adjoint de l’APLV !). Le Président devait toujours les relire attentivement, pour couper court aux récriminations de ceux dont les paroles auraient été infidèlement transcrites. Dans ces réunions, les trois représentants des langues vivantes dans les Conseils d’Enseignement (élus du SNES, mais désignés par l’APLV) avaient indiqué leurs propositions, leurs votes, leurs réactions aux projets gouvernementaux.
L’articulation entre orientations syndicales et positions de l’Association ne posait pas de problème majeur. Mais la mise en cause par divers projets de loi de l’enseignement d’une seconde langue était grosse de difficultés à venir, puisque le choix de cette seconde langue se faisait essentiellement entre l’allemand et l’espagnol. On trouve alors dans cette rubrique des lettres échangées entre le Président et l’Inspecteur Général (ce type de confrontations s’est reproduit et je l’ai signalé lors du numéro 3/1998 consacré à l’Inspection). On y trouve aussi les comptes-rendus envoyés par les Régionales et celui de l’Assemblée Générale annuelle, qui se tenait au C.I.E.P.(Centre International d’Etudes Pédagogiques) de Sèvres.
Sous la rubrique Pédagogie on trouve : « Des progrès des élèves en langue vivante », « D’Alain à Keats », « Nos instruments de travail » (ici une bibliographie d’initiation au russe fournie par un collègue).
Dans la Tribune Libre, l’auteur proposait l’apprentissage de l’esperanto pour tous, pour contrer le projet du Monde bilingue, qui voulait imposer l’apprentissage général de l’anglais !
Du côté de la Bibliographie, on trouve l’analyse de neuf livres portant sur l’allemand (pédagogie ou littérature), quinze pour l’anglais, deux sur la littérature espagnole, et enfin la Revue des revues.
La troisième page de couverture donne le taux des cotisations, ainsi que la liste des Trésoriers régionaux auxquels elles étaient versées (Alger et Oran figurent dans la liste). La quatrième indique que l’APLV a son siège au Musée Pédagogique, 27 rue d’Ulm, Paris 5e. Au dessous figure la liste des membres du bureau et des représentants des langues vivantes aux Conseils d’Enseignement.
Notre Association passe de 3.000 à 3.500 membres entre 1953 et 1957. Chaque année est publié un tableau statistique, classé par Régionales, indiquant le nombre d’adhérents de chaque département. Les comptes-rendus des diverses réunions ou des Journées d’Etudes occupaient alors une place importante, qu’on jugeait impossible à réduire. La principale innovation de cette période fut la publication d’un numéro contenant le texte des épreuves de langues proposées aux divers concours, de l’Agrégation au concours d’entrée à l’Ecole des Ingénieurs mécaniciens ... Les collègues trouvaient ce service utile et les langues dites ‘rares’ ont eu un peu d’espace éditorial. Enfin, en 1956, apparaît une rubrique Moyens audio-visuels. En 1957 sont ajoutées à l’annuaire des informations relatives à l’administration de l’Éducation Nationale, rubrique développée plus tard, tandis que disparaissait l’annuaire, trop vite périmé. De temps en temps paraissait un article en anglais. En tant que Rédacteur en Chef, je souhaitais renforcer la partie linguistique et pédagogique et surtout arriver à un meilleur équilibre dans la représentation des diverses langues, notamment l’espagnol et l’italien, afin d’attirer vers l’Association des professeurs de langues autres que l’anglais et l’allemand. Je n’ai pu que très partiellement vaincre une certaine hostilité, notamment des professeurs d’espagnol, qui, avec Les Langues Néo-latines, possédaient leur propre revue, qui a fêté son centenaire il y a quelques mois.
Un tournant s’est amorcé vers 1957 : les membres des Néo-latines ont été invités à participer plus activement à la vie de la revue, un de leurs membres, J. Rebersat, est élu Secrétaire Général, avant de devenir Président de l’APLV quelques années plus tard. Peu à peu l’arabe et le russe sont mieux représentés. L’AG élit enfin un vrai Comité de Rédaction (j’avais jusque là fait appel à mes amis et connaissances pour nourrir la revue - c’est ainsi que Claude Pichois, éminent spécialiste de Baudelaire, nous a donné deux articles sur la littérature anglaise).
Tout rédacteur en chef doit s’attendre à recevoir des lettres de lecteurs, plus souvent courroucés que satisfaits ! Ainsi, j’avais laissé passer le titre d’article suivant : Une nouvelle image de l’apogée victorienne. Un hispaniste (éminent !) me fit remarquer que le mot apogée est du masculin : je ne me serais pas trompé si je l’avais rapproché de son équivalent espagnol apogeo...
J’ai donné ma démission en mars 1958, pour devenir Vice-Président. Seize rédacteurs en chef se sont succédés ensuite, pour des durées variables, jusqu’à six ans pour Bernadette Grandcolas. Occuper cette fonction est une lourde responsabilité, qui s’ajoute à celles de la vie professionnelle. Mais le côté concret de la réalisation de chaque numéro apporte de réelles satisfactions, dont j’ai su gré à l’époque à ceux qui m’en avaient chargé.