Synthèse rapide d’après les résultats de l’enquête nationale réalisée auprès des collègues par l’APLV à l’issue des épreuves de langues vivantes au baccalauréat 2013.
Cette synthèse concerne les épreuves orales pour lesquelles des modifications urgentes s’imposent en priorité.
Les résultats de cette enquête représentative [1] ainsi que leur analyse effectuée par un groupe de travail [2] ont été présentés lors de la journée d’étude organisée par l’APLV, le samedi 12 octobre dernier, au Lycée Henri IV à Paris, dans le cadre de son Assemblée Générale, en présence de représentants des instances nationales des syndicats SNES et FO. L’APLV publiera prochainement les résultats complets [3] de cette enquête avec leur analyse. L’APLV a également adressé dès le lendemain de son Assemblée Générale une demande écrite d’audience au Ministre de l’Éducation Nationale, Vincent PEILLON, pour lui présenter ses conclusions reposant sur les résultats de cette enquête et lui formuler les modifications importantes nécessaires qu’elles induisent.
Épreuves de compréhension de l’oral
Si la grande majorité approuve l’introduction d’une épreuve de compréhension de l’oral, cette épreuve fait l’objet de critiques massives aussi bien quant à son équité, sa préparation, son organisation, son déroulement que son évaluation.
Le manque d’équité a été flagrant et les causes citées sont innombrables : diversité des sujets (vidéo, audio…), des dates, d’interprétation des fiches d’évaluation, des conditions de passation de l’épreuve, de la correction et de la notation (concernant par exemple l’anonymat, l’échelle de notation qui pénalisait ou avantageait fortement ceux qui avait un niveau intermédiaire, l’harmonisation, le relèvement des notes considérées trop basses imposé dans certains endroits et pas dans d’autres…). Les collègues ont rencontré de grandes difficultés à trouver des enregistrements adaptés au programme traité et correspondant aux critères. A cela s’ajoutent les difficultés matérielles rencontrées aussi bien pour la recherche et la mise en forme des sujets que pour la passation de l’épreuve.
Le compte rendu en français recueille des critiques portant moins sur le recours à l’expression en français que sur la nature de la tâche.
Les fiches d’évaluation sont très critiquées. De nombreux collègues déplorent les écarts trop grands entre les paliers du barème, ainsi que les grandes disparités entre établissements, certains ayant tout fait pour favoriser le travail en équipe, la concertation et l’harmonisation, d’autres non, certains ayant organisé et préparé les épreuves (grilles d’évaluation photocopiées, listes d’émargement fournies...), d’autres non.
La durée de l’épreuve (10 minutes) est jugée insuffisante, de nombreux collègues estimant en particulier que cela avait pénalisé les bons élèves.
Vu la lourdeur de l’épreuve et la désorganisation des enseignements avec des disparités énormes, selon que les services administratifs de l’établissement prenaient ou non en charge tout ou partie des tâches matérielles, que les services académiques intervenaient ou pas… quelques collègues souhaitent la suppression pure et simple de cette épreuve.
Épreuves d’expression orale des séries autres que L
Elles sont l’objet d’une relative approbation quant au principe de leur existence, mais par ailleurs des critiques massives quant à leurs modalités d’organisation.
Depuis de nombreuses années, il n’y avait plus d’évaluation de l’expression orale dans les séries générales ES et S. La réintroduction de cette évaluation était une attente et une demande forte de la profession.
Si la nouvelle épreuve d’expression orale des séries autres que L rencontre l’approbation de 56% des collègues sondés, un très grand nombre d’entre eux indiquent cependant qu’ils en approuvent plus le principe que les modalités d’organisation, et détaillent leurs griefs. La réponse positive des enseignants est donc un « oui, mais… ».
Les critiques émises de manière très massive sont de plusieurs ordres :
– Les professeurs de langue ont eu souvent le sentiment d’être abandonnés à leurs propres ressources et à leur réflexion individuelle. L’institution a été singulièrement absente en amont des épreuves. Aucun enseignant ne fait référence à un stage d’information, très peu évoquent les textes officiels et seules trois réponses font référence à des informations fournies par des IPR (et dans deux cas uniquement sur les modalités de passation des épreuves).
– Le contresens sur le concept de notion du programme, insuffisamment expliqué par l’institution et ses relais, a conduit à une très grande frustration des collègues, qui ont eu souvent l’impression que les élèves qu’ils interrogeaient récitaient des résumés appris par cœur, voire des synthèses copiées d’Internet.
– Le rejet de l’obligation faite aux professeurs d’interroger des élèves de leur établissement, et a fortiori leurs propres élèves, est massif. De très nombreux collègues demandent des permutations de lycée à lycée dans un même bassin ou une même ville. Il s’agit pour eux tout autant d’une question de protection personnelle (en particulier de la part d’enseignants qu’on peut supposer fragiles) que d’un problème d’équité.
La perception majoritaire des collègues est que les épreuves, ne comportant pas la totalité (et dans certains cas aucun) des rituels d’un examen, perdent de leur solennité auprès des candidats : absence de convocations ou de listes d’émargement, élèves en retard ou absents, familiarité avec l’examinateur
Épreuves orales en serie L
Comme pour les autres séries, c’est l’absence d’information cohérente des collègues par l’institution et les disparités entre académies, établissements et le calendrier des épreuves qui ont posé les problèmes majeurs.
Les élèves de la série L étaient interrogés à l’oral par un examinateur en dehors du cadre de l’établissement.
Les enseignants déplorent massivement le manque d’informations claires au sujet de cette épreuve. Il existe un flou total concernant les attentes : les textes à disposition devaient-ils servir à étayer l’argumentation sur la notion, ou servaient-ils à faire un commentaire de texte ? Fallait-il donner à l’élève une liste des documents étudiés en classe ? Le BO ne fournissait aucune précision sur ce point.
La série L a été systématiquement laissée de côté lors des réunions d’information alors que c’était la série la plus complexe pour ce qui concerne les épreuves d’oral.
Le protocole de passage des épreuves n’a jamais été confirmé officiellement et les élèves ont reçu leurs convocations très tard.
Les enseignants se sont trouvés mis dans la situation d’être incapables de donner des indications claires à leurs élèves. Les documents proposés sur Éduscol et dans le FAQ ne répondaient pas à toutes les questions.
On constate que d’un établissement à l’autre, d’une académie à l’autre tout le monde n’a pas compris la même chose et on peut ajouter qu’aucun document n’est clair sur la façon d’organiser les épreuves orales lorsque les élèves ont plusieurs options. Par conséquent on peut se demander si les modalités de passage du Baccalauréat actuel correspondent aux critères et aux caractéristiques d’un examen national. Pour des motifs semblables, beaucoup de professeurs déplorent la différence de traitement entre les élèves de série L et les autres. Placer l’épreuve d’expression orale à la fin de l’année scolaire permettrait au moins de réduire le sentiment d’inégalité entre les séries et les candidats.
Épreuve orale de littérature en langue étrangère en série L
Si une grande majorité de professeurs a apprécié la création de ce nouvel enseignement sur le cycle terminal (enseignement en première et terminale), qui est une manière de valoriser la série littéraire, la préparation et l’organisation des épreuves ont été également très problématiques et inégales selon les académies, les langues et les centres.
Les enseignants déplorent des instructions très vagues et une mise en place des épreuves plus qu’approximative ! Les instructions indiquent de transmettre deux dossiers comportant les thématiques et les documents s’y rattachant alors que dans la réalité certains candidats ne proposaient qu’un dossier, ou pas de dossier. Le professeur interrogateur se trouve donc dans l’obligation de proposer un document inconnu au candidat.
De nombreux enseignants souhaitent l’organisation d’une formation ou au moins une réunion d’harmonisation qui leur permettrait de confronter leurs démarches, pour mieux préparer les élèves à l’épreuve orale.
Les élèves ont trouvé assez difficile d’accoler cet oral à l’épreuve orale de langue et de changer de sujet rapidement en milieu d’épreuve.
L’ambition du programme et des attentes est en contradiction totale avec les cinq minutes de PPC [4] qui semblent insuffisantes quand l’élève a vraiment travaillé.
L’élève présente souvent un discours appris sur une thématique.
Par ailleurs l’épreuve orale est jugée trop courte pour pouvoir faire le tour d’une thématique et pour faire des ’ponts’ entre les œuvres étudiées et présentées.
La grille d’évaluation de l’épreuve de Littérature en Langue étrangère semble beaucoup trop exigeante au regard des conditions de préparation actuelles et le coefficient paradoxalement ridicule.
Les professeurs préconisent un oral réaménagé, car les épreuves accolées en LVA/LVO et littérature sont trop lourdes pour un élève de terminale.
Ils proposent notamment une épreuve d’oral isolée pour la matière LELE ou même un court écrit associé à l’épreuve écrite de LV1.
Comme elle l’a formulé lors de la conclusion des débats lors de la journée d’étude du 12 octobre dernier, par la voix de son président Jean-Marc Delagneau, l’APLV demande, vu l’avancement de l’année scolaire en cours, que le Ministère mette en place d’urgence un groupe de travail pour procéder à des modifications rapides de ces épreuves, de leur préparation, et de leur calendrier, avec de véritables informations, formations et un soutien efficace des collègues par leurs hiérarchies, pédagogique comme administrative, comprenant la mise à disposition d’un éventail de ressources pédagogiques adaptées et suffisantes. Ces modifications sont destinées à garantir l’égalité républicaine ainsi que la valeur de l’examen national du baccalauréat sur l’ensemble du territoire, que l’absence d’anonymat et les différentes disparités constatées lors des épreuves de langues vivantes ont remises en cause.