Le ministre promet :
« Les enseignements "de la seconde à la terminale" sont dispensés en groupes de compétences » Or le découpage des langues en compétences séparées (compréhension écrite, production orale...) ne fait pas du tout l’unanimité des linguistes.
La mise en place de groupes de compétences entraînera l’éclatement du groupe classe, cadre de travail et de vie scolaire souvent très important pour une majorité d’élèves : les classes seront « éclatées » aux heures de LV selon le « niveau de compétence » en groupes variables pendant l’année ; ainsi un(e) élève pourra être confié(e) à 1,2,3,4 professeurs différents au cours de l’année (quid du suivi des élèves ?). A terme, un même groupe sera composé d’ élèves de profils parfois très différents (toutes filières confondues) présentant des écarts d’âge importants (les groupes seront composés d’élèves de seconde, première, terminale, en fonction de leurs niveaux dans les différentes compétences, or on ne s’adresse pas de la même manière à un jeune de 14 ans et à autre, jeune majeur !). Quant au nombre d’élèves par groupe...? La globalisation des horaires entraîne le risque de « défavoriser » la LV2 au profit du « tout anglais », servira de variable d’ajustement des services et des budgets.
Le ministre menace :
« les programmes et les horaires sont désormais communs aux différentes séries de la voie générale » Les horaires de LV1-LV2 sont globalisés pour faciliter la constitution des groupes de compétences »
Normal, l’évaluation des compétences ci dessus mentionnées se fait principalement sous forme de QCM ; les exigences sont communes et donc font référence au Plus Petit Commun Dénominateur . Les entreprises privées sont déjà sur les rangs et proposent une « évaluation externe » car « neutre » et impartiale (nous appelons cela le bac). Coût : entre 80 et 100 euros par élève et par évaluation : qui va payer ? La pub ?
Exemple : Au Lycée Pissaro de Pontoise, l’Institut Cervantes a opéré ce type d’évaluation en classe européenne en mars 2010 ; résultats promis en … janvier 2011 ; il faut protéger les droits d’auteur ? Que devient le Service Public ?
Le ministre voudrait faire rêver :
« Chaque fois que cela est possible l’enseignement d’une discipline générale (...) est proposé en langue étrangère aux lycéens. Les compétences en langue étrangère des enseignants des disciplines non linguistique (DNL) sont mieux reconnues. L’utilisation généralisée des TICE permet un meilleur apprentissage oral des langues étrangères »
Pour les élèves en difficulté, suivre un cours d’une matière autre que linguistique en LV comporte clairement le risque de lui faire perdre pied dans cette matière. Et quel cadrage pour la « certification » des enseignants concernés ?
Quant aux TICE, encore faut-il qu’ils soient installés en nombre (utilisables simultanément par les groupes de compétences identiques aux horaires alignés), fiables, et que les enseignants reçoivent une formation sérieuse, continue dans l’utilisation des ces instruments, par ailleurs certainement très utiles.
Le ministre affirme :
« Chaque élève » a désormais un correspondant étranger avec lequel il peut échanger. Les partenariats entre établissements facilitent les séjours linguistiques qui sont pris en compte dans le cursus de l’élève. » Les enseignants de LV sont heureux d’apprendre que le Ministère a mis ou met tout en œuvre pour trouver environ 350 000 correspondants étrangers pour les élèves de seconde dès l’année 2010-2011 et s’engage à donner les moyens (humains, financiers, techniques) d’aider les élèves à en trouver désormais chaque année autant. Internet va chauffer, les bureaux de poste ruraux vont rouvrir !! Quant à la prise en compte dans le cursus, selon quelles modalités ? Dans quelle mesure ? Au delà de l’effet d’annonce, il s’agit aussi de limiter l’importance des matières scolaires au profit des activités « péri-scolaires » « et sociales (le « community work à l’américaine et on sait ce que pense le Président américain de son système éducatif...) Et quelles mesures concrètes ont-elles été prises pour faciliter les séjours linguistiques : formalités administratives, structures publiques non lucratives, coûts et prise en charge (Educ. Nationale, Régions, Départements ? Familles ? Publicité ?) encadrement des jeunes, égalité des familles entre elles....
Les enseignants proposent :
Une refonte sérieuse des programmes qui permette de renforcer la fonction de communication des langues sans leur retirer leur caractère d’outil culturel ; une consultation sérieuse et réelle des professeurs pour cette refonte ;
Des horaires hebdomadaires dans tout le second degré d’au moins trois heures en groupes restreints (max. 20-24 élèves), des dédoublements de ces groupes pour le
travail de l’oral ;
Une formation initiale et continue dynamique, notamment pour intégrer les nouvelles techniques ; du personnel pour l’entretien du matériel informatique et multimédia ; un équipement de l’ensemble des établissements indépendamment des politiques et moyens départementaux et régionaux.
Une diversification de l’offre en LV : Les langues ne doivent pas se limiter à l’anglais et l’espagnol, la diversification augmentant l’ouverture de notre société au monde
Jean-Charles Fernandes, Professeur d’Anglais, Coordinateur des professeurs de langue au lycée Camille Claudel, Vauréal, Val d’Oise