Il y a, dans le monde de l’édition, des secteurs « non rentables », des pans entiers de la création littéraire qui sont laissés en friche par les empires des médias. Les volumes de vente sont incertains ou jugés négligeables.
La littérature contemporaine en édition bilingue est l’un de ces terrains vagues, et c’est sur cette tierra de nadie que les éditions equi-librio ont décidé de s’installer. Si elles n’y font pas pas fortune, elles espèrent au moins éveiller l’intérêt pour une littérature florissante, surprenante, déroutante parfois, la littérature de langue espagnole contemporaine.
Quelques amis, enseignants de l’Académie de Lyon, Toulouse et Nantes ainsi que des non-enseignants, bilingues, passionnés de littérature espagnole et latino-américaine, bien conscients des difficultés, ont décidé de créer une structure qui leur permette de faire partager leurs lectures à un cercle plus large que celui des hispanistes.
S’ils ont choisi la forme bilingue, c’est que, comme nous l’avons déjà écrit, ce secteur semble délaissé par le monde de l’édition où il existe d’excellentes collections de classiques bilingues, mais où la littérature contemporaine est introuvable sous cette forme.
Selon Gonzalo Navarro, l’un des responsables de la toute nouvelle maison d’édition, la forme bilingue est une forme particulièrement appréciée par les jeunes auteurs, inédits dans leur propre pays. D’une pierre ils font deux coups : ils peuvent diffuser leur œuvre dans les deux langues. C’est aussi la garantie que leur voix ne sera pas étouffé par celle du traducteur, leur texte est là, en référence.
La mise en page est adaptée à cette demande des jeunes auteurs : hormis le premier volume de la collection, Botanique du Chaos, de Ana María Shua, dont les textes courts ont été placés en vis-à-vis, les publications présentent d’un côté le texte en français, et lorsqu’on retourne le livre, le texte original en espagnol.
La principale source, en ce qui concerne ces jeunes auteurs découverts par les Editions equi-librio, est constituée par les revues littéraires espagnoles et latino-américaines, nombreuses sur Internet, ainsi que par les blogs de ces mêmes auteurs. Lorsqu’un texte attire l’attention, l’auteur est contacté, et il lui est proposé d’envoyer une cinquantaine de pages de ses contes, micro-fictions ou autres textes.
Les choix sont éminemment subjectifs ; ils ne sont en aucun cas guidés, selon Gonzalo Navarro, par la perspective du volume de ventes escompté. Les textes de jeunes auteurs dans lesquels apparaît un style propre, un univers particulier, même s’ils contiennent parfois quelques maladresses, sont retenus.
Les traductions sont faites par un professeur agrégé d’espagnol, en étroite collaboration avec les auteurs. Là encore, Internet est un outil précieux, la communication est rapide, le traducteur peut à tout moment demander une précision à l’auteur, lui expliquer ses choix.
En quoi equi-librio est-elle une maison d’édition équitable ?
Le contrat que les éditions equi-librio proposent aux auteurs est clair :
– l’auteur conserve ses droits sur son œuvre. Il la cède sans exclusivité pour son exploitation en édition bilingue.
S’il estime que son œuvre n’est pas traitée convenablement par l’éditeur, ou s’il reçoit une proposition qui lui semble plus avantageuse, l’auteur peut à tout moment mettre fin au contrat.
Dans ce cas, l’éditeur ne peut poursuivre la vente que jusqu’à épuisement du tirage (très limité, grâce à l’impression numérique : 100 à 200 exemplaires en général).
– l’auteur bénéficie d’une répartition équitable du produit de l’exploitation de son œuvre (pour les contrats en cours : 30% du prix HT de vente au public sur chaque livre-papier ou pdf vendu).
– tous les auteurs, quelle que soit l’ampleur de leur œuvre et leur notoriété sont traités de la même façon : ils restent « en vitrine » aussi longtemps qu’ils le désirent ; equi-librio leur laisse le temps de trouver leur lectorat, il n’y a pas de rotation ou de mise au pilon si l’ouvrage ne se vend pas suffisamment.
Les engagements des Editions equi-librio ne figurent pas dans une charte mais sous la forme bien plus contraignante du contrat. equi-librio est une SARL : l’idée d’association a but non lucratrif a été écartée :
pour les auteurs, il est important de savoir que financièrement, l’éditeur a autant intérêt que lui à la diffusion de son oeuvre (voire davantage, puisque c’est lui qui fait l’avance des frais d’impression, de diffusion, etc.).
Toutes ces informations et d’autres encore sont sur le site de equi-librio